Opinion : Comment sécuriser durablement les recettes douanières au Tchad ? par Mahamat Sougui Bié
Il vous souviendra que dans notre précédente publication, nous nous sommes indignés par le fait que la douane du Burkina-Faso, un pays enclavé ayant les mêmes réalités économiques que nous, arrive facilement à faire 262 milliards de recettes en un seul trimestre mais paradoxalement (site de la douane de ce pays), nous éprouvons d’énormes difficultés à faire ne serait-ce 200 milliards pendant toute année y compris les contentieux qui sont accessoires et accidentels. Sur ce, nous ne décourageront point de dénoncer cette déperdition fatale à nos finances publiques et tant que les choses ne reviennent pas à la normale, nous dénoncerons les pratiques malsaines de la douane nationale du Tchad et non celle d’un quidam. Aux dernières nouvelles, les services de la douane n’appartiennent à personne. Entre parenthèses.
Également, dans ce post, nous avions proposé plusieurs solutions que nous les pouvons catégoriser en trois blocs :
D’abord, il faut mettre en place un statut particulier de la douane nationale afin que ses agents se voient protéger dans leurs tâches quotidiennes et par ricochet se sentent en sécurité professionnelle.
Bizarrement, par le passé, un ex directeur général, avait utilisé tout son génie non pas pour mettre en place ce statut particulier tant recherché ou attendu par les douaniers sérieux mais avoir seulement l’autorisation de mettre une plaque d’immatriculation intitulée : DN. Quel sacré travail ! Bravo monsieur le DG d’alors de passage !
Dans ce futur statut particulier, les douaniers inspecteurs principaux, inspecteurs, contrôleurs et contrôleurs principaux se verront nommer exclusivement dans toutes les fonctions tant au niveau central que déconcentré. C’est-à-dire, dorénavant seuls ces derniers seront nommés comme directeurs généraux, directeurs et sous-directeurs techniques, chefs des divisions, chefs des services, chefs circonscriptions et secteurs, chefs des bureaux, brigades ainsi que les chefs des sections.
Que les non-professionnels qui se sentent léser n’ont qu’à partir à l’école de douane pour passer des nuits blanches et revenir avec leurs diplômes d’inspecteur ou de contrôleur pour réclamer une nomination. Sinon, Barra !
Plus loin encore et dans ce même statut particulier, les douaniers se verront attribuer des avantages qui seront distribués au prorata de leurs parts tous les trimestres sur les dépassements des recettes prévues initialement afin qu’ils soient mis à l’abri ou à la tentation des transactions (corruption) d’un côté et de l’autre, être poussés à doubler d’efforts pour à la fin avoir plus d’avantages. Le principe est simple mais terriblement efficace.
À titre d’illustration, nous pouvons dire que chaque bureau ou secteur doit prélever 20 % sur les dépassements des prévisions trimestriellement contrairement aux 3 % prévus actuellement et sur l’année. D’ailleurs très insignifiants par rapport au nombre de douaniers. Général 3 milliards par année pour plus de mille huit-cents agents douaniers. C’est rien contrairement aux recettes qu’ils sont censés recouvrir et protéger.
Il convient de rappeler qu’au fur et à mesure, les pourcentages des 20 % à prélever sur les dépassements doivent être revus en baisse pour chaque nouvel exercice.
À vrai dire, avec cette proposition, les prévisions très basses de recettes douanières annuelles (généralement au tour de 200 milliards) et qui ne respectent pas le principe de sincérité budgétaire (ne pas sous-estimer les recettes ni même surévaluer les dépenses et vice versa), deviendront très insignifiantes par le fait que les dépassements des ressources, dûs à cette dernière (notre proposition), augmenteront exponentiellement. Nous verrons très certainement que les dépassements pourront même dans moins de cinq ans dépasser les prévisions budgétaires initiales en la matière. Être humain ne joue pas quand il va gagner et plus quelque part.
Ensuite, il faut abroger urgemment toutes ces exonérations (totales ou partielles) répétitives et improductives voire farfelues.
De nos, la douane exonère tous les produits de première nécessité, les matériaux de construction, les téléphones ainsi que d’autres produits importés parmi lesquels nous pouvons citer les panneaux photovoltaïques et les batteries solaires.
Cependant, force est de constater que ces exonérations n’impactent aucunement les populations, c’est-à-dire les consommateurs finaux. Au contraire, les prix augmentent. Quel gâchis !
Avec ces exonérations répétitives et improductives, l’État perd doublement.
Imaginez que seul le bureau de l’aéroport international Hassan Djamous de N’Djamena perdrait par semaine plus de 100 millions de recettes suite à l’exonération des téléphones soit plus de 2,5 milliards l’année (251 jours ouvrables de l’année). Pourquoi ? Mystère !
De l’autre côté, paradoxalement les prix des téléphones n’ont point diminué. Pire, ils continuent d’augmenter au fur et à mesure. Voilà le bel exemple de l’inefficacité des exonérations.
Enfin, l’épineuse question du prélèvement réel de la TVA sur le cordon douanier.
Il faut comprendre que le rôle premier de la douane est de dissuader. C’est-à-dire lutter contre la contrebande et la fraude et le contrôle de tout ce qui entre et sort du pays. Néanmoins, pour liquider les marchandises importées, elle empiète légalement sur le domaine fiscal en calculant la TVA (19,25). Cette dernière est d’ailleurs le gros poisson dans une déclaration. Les taxes d’intégration communautaire (TIC) et les redevances statistiques sont très minimes par rapport à elle.
Ce faisant, tout le problème réside sur le fait que les marchandises importées sont systématiquement minorées et, par ricochet, la TVA se voit également minorée. N’a-t-on pas dit que l’accessoire suit le principal ?
Pour éviter drastiquement cette pratique malsaine de minoration, il faut impérativement faire participer les inspecteurs des impôts lors des visites des marchandises pour qu’ils liquident eux-même la TVA. De ce fait, le transitaire ne peut pas doubler à la fois les inspecteurs des impôts et ceux de la douane à moins qu’il y ait une entente généralisée.
Tant que les marchandises sont minorées, le gros poisson des recettes douanières (TVA) se verra aussi minorer et concomitamment, l’État perd énormément des ressources.
Pour finir, comme nous l’avions dit par le passé, nous devons inévitablement fusionner les services de la douane avec ceux des impôts pour en créer un seul : Office Tchadien des recettes comme celui du Rwanda ou du Togo.