Société: La Moldavie, le pays où une mort sur quatre est liée à l’alcool
Le petit pays d’Europe de l’Est a le taux de mortalité liée à l’alcool le plus élevé du monde. Time Magazine analyse en profondeur ce mal endémique moldave.
En Moldavie, une mort sur quatre est liée à l’alcool. Contre une sur vingt en moyenne à l’international. Le pays de l’ex-Union soviétique est le triste champion du monde de la consommation d’alcool, selon l’Organisation mondiale de la santé. Il est aussi le pays où le taux de mortalité liée à la boisson est le plus élevé.
Dans un article publié à la fin du mois d’août, Time Magazine décrypte ce problème chronique en plongeant au cœur des contrées moldaves, où un cinquième de la population rurale vit sous le seuil de pauvreté.
En Moldavie, où la cirrhose du foie est plus fréquente que nulle part ailleurs en Europe, les hommes vivent en moyenne jusqu’à 68 ans, les femmes jusqu’à 75 ans. Les moyennes européennes sont respectivement de 79 et 84 ans.”
Inciter à ne pas consommer
Des données de l’OMS avancent même qu’en 2016, en Moldavie, les plus de 15 ans buvaient en moyenne 15,2 litres d’alcool pur par an, “soit l’équivalent de 167 bouteilles de vin”. Les chiffres précis sont néanmoins difficiles à obtenir, admet l’hebdomadaire américain, car “70 % de l’alcool consommé en Moldavie est du vin fait maison”.
“L’alcool est le moteur de l’économie et de la communauté”, comme à Puhoi, un village situé au sud-est de la capitale moldave, Chisinau, et mentionné par Time.
Pour combattre la consommation d’alcool dans son village, le maire de Puhoi, Petru Frunze, a même lancé un concours : tout couple qui resterait sobre pendant six mois se verrait offrir un job et une somme d’un peu plus de 200 euros.
Vingt couples se sont inscrits, mais un seul a réussi. Comme promis, Frunze leur a trouvé un emploi de nettoyeurs dans la capitale, Chisinau, à 30 kilomètres de là. Il a même couvert leurs frais de voyage. Mais en quelques mois, ils ont rechuté et recommencé à boire.”
Migrations et paupérisation
L’Union soviétique a encouragé la production d’alcool, jugée très rentable. Après l’effondrement de l’URSS, des vagues d’émigration, essentiellement de travailleurs, en particulier vers la Russie ou l’Italie, ont vidé les territoires ruraux et “alimenté l’abus d’alcool”, souligne le magazine. Cet abus a dégradé les conditions de vie sur place, entraînant violences, délinquances et crimes dont les ONG se font l’écho.
“La Moldavie n’est pas indifférente à cet abus d’alcool endémique à l’intérieur de ses frontières”, observe néanmoins Time Magazine. L’hebdomadaire relate les différentes initiatives et lois prises par les pouvoirs publics, citant un programme de 2012 qui faisait notamment passer de 16 à 18 ans l’âge légal pour consommer de l’alcool.
Des initiatives dont l’application est délicate, sans compter les coûts élevés des traitements médicamenteux et des programmes de désintoxication, le salaire moyen mensuel d’un Moldave se situant autour de 300 euros.
Time conclut son reportage en décrivant une réunion des Alcooliques anonymes (AA), notant que “l’anonymat, qui est la clé des AA, est particulièrement important en Moldavie, où la stigmatisation entourant l’alcoolisme est forte”, en particulier contre les femmes.