Tchad : Ce 17 novembre, le Ouaddaï commémore les 107 ans du « massacre de Coupe-Coupe »
Ce 17 novembre marque la commémoration du douloureux événement du massacre de Coupe-Coupe, au cours duquel plus de 400 oulémas ont été tués dans la ville d’Abéché. Le massacre a duré trois jours consécutifs, les 15, 16 et 17 novembre 1917.
Appelé aussi massacre de Kobkob, l’événement est survenu le 15 novembre 1917 à Abéché, dans le Ouaddaï, alors territoire sous colonisation française, ayant causé la mort de plus de 400 personnes, dont des faqîh (érudits).
Le 23 octobre 1917, un colon du nom de Guyader a été tué par coups de couteau au marché d’Abéché, et un autre sous-officier a été blessé. Le chef de la circonscription, un commandant nommé Gérard, soupçonne alors, à tort, les notables du Ouaddaï et les érudits d’avoir monté un complot contre les Français. Accusant les faqîh d’avoir organisé une attaque contre les troupes coloniales, il ordonne une série d’exécutions.
Ainsi, le matin du 15 novembre, le commandant Gérard ordonne aux troupes coloniales de tuer le chef militaire de Dokom et ses hommes, ainsi que les faqîh, des érudits ayant des écoles coraniques. Pendant trois jours, du 15 au 17 novembre, les troupes coloniales françaises commettent l’un des plus grands massacres dans la ville d’Abéché.
Insatisfait de la cruauté de son acte, le commandant Gérard ordonne de mettre les têtes des victimes sur des piques. Les victimes sont ainsi décapitées, et leurs têtes sont placées en deux rangées à l’entrée de la ville, à l’emplacement actuel du monument aux morts d’Abéché. Outre les massacres d’Abéché, le chef de la tribu des Mahamid est également arrêté et tué à Biltine, avec une quarantaine de ses proches et alliés.
Pendant le massacre, les troupes coloniales pillent et saccagent les habitations des habitants, notamment dans le quartier de Chig-el-Fakara (un quartier des érudits). Après le massacre, le commandant Gérard arrête et déporte des dizaines de personnalités politiques et religieuses influentes du Ouaddaï vers d’autres pays d’Afrique équatoriale française afin de dissimuler son crime.
L’armée coloniale française déploie tous les efforts pour étouffer cette affaire, surtout dans un contexte où l’Europe est préoccupée par la Première Guerre mondiale. Cependant, l’affaire finit par être rendue publique, provoquant un scandale en 1918.
En juillet 1918, le commandant Gérard est destitué par les autorités françaises et traduit devant la justice militaire en 1922. Il est renvoyé de l’armée sans autre forme de punition.
Plus de 100 ans après ce crime, la France n’a jamais reconnu sa responsabilité dans le massacre, bien qu’il ait été ordonné par l’un de ses officiers. Les victimes n’ont jamais été indemnisées. Cette histoire tragique reste méconnue du public tchadien, bien qu’elle fasse partie des crimes coloniaux que les jeunes générations tchadiennes devraient connaître.