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Tribune/Covid19: de « grands bruits pour rien » sur les cas suspects a crée la honte et la peur

Le juriste et journaliste Jean Bosco Manga fait une analyse sur la gestion des cas suspects de la covid 19 à N’Djamena.

Si aujourd’hui, la propagation a pris de l’ampleur et les morts silencieux se multiplient, c’est que, dès le début, l’approche contre les cas suspects a manqué de tact et de respect de leur intimité, de leur notoriété, créant la peur et la honte au sein de la population où certains s’imaginaient mal dans une pareille situation.

Imaginez-vous que lorsque vous êtes suspecté, l’ambulance avec la sirène débarque chez vous en plein jour, parfois accompagnée des forces de l’ordre sous l’oeil de tout votre quartier, de votre famille, de vos enfants… Dans les Provinces, il semblerait que c’est parfois le Gouverneur même qui se déplace avec toute sa sécurité pour accompagner l’ambulance. Devant votre domicile, on installe des militaires pendant au moins 14 jours. Une solennité outrancière qui sème la terreur et la panique plutôt.

À votre retour, vous êtes stigmatisé, on vous surnomme  »Corona »… Et les autres qui se sentaient malades ou se suspectaient ont commencé à se cacher pour s’automédicamenter et préfèrent mourir en silence que de se faire humilier par une maladie qui commence à faire  »honte » et  »peur » en même temps. Ceux ou celles qui avaient les moyens ont commencé à se cacher dans de prestigieux hôpitaux pour être mieux pris en charge discrètement au lieu de se mélanger à l’hôpital-de-tout-le-monde de Farcha.

Le dispositif mis en place dans ces hôpitaux des  »grands » n’a pas permis de limiter tôt les dégâts où l’accès aux malades étaient pratiquement libre pour  »assister » le malade selon notre légendaire solidarité. Surtout que quand tu es quelqu’un, personne ne veut manquer à l’appel lors des visites. De fil en aiguille, on se retrouve avec des cas parfois avancés, sans solution médicale, ou des décès qu’on ne teste qu’après pour les statistiques. Entre-temps, combien étaient en contact avec le malades non-déclarés et les décès qu’on a testé après ou qu’on a jamais testé à défaut d’être passés par la morgue.

Pour dire vrai, nous sommes une société orgueilleuse qui n’aime pas voir son honneur être froissé, qui n’accepte pas des frustrations et des humiliations publiques, même pour des raisons sanitaires soient-elles. C’est notre nature aussi. Même si le Covid-19 n’est pas une maladie de honte, l’approche tendant à  »crier » sur le malade ou le suspect frustre celles ou ceux qui l’observent. Personne ne peut être fier de voir son proche dans cette situation.

Aujourd’hui, nous sommes avec la maladie. Il n’y a rien d’extraordinaire à  »fanfaronner » pour déplacer un malade dans un centre de soins. Si on vous indique la position du malade, il faut au moins de la discrétion pour préserver son intimité et même sa notoriété dans le milieu où il vit. Cela encouragerait les cas suspects à se dénoncer pour se faire soigner.

Sinon, le Tchadien, dans son orgueil, continuera à se cacher pour se tuer et tuer les autres. Il faut commencer à rendre humaine et normale cette maladie, en évitant l’approche de fanfare qui frustre et rend réticent les cas suspects qui continuent de se cacher. Au besoin, faire une campagne de proximité pour encourager les gens qui se suspectent de porter leurs masques et d’aller discrètement dans les centres pour se faire dépister et se soigner. Sinon, la fin n’est pas pour demain.

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