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Tribune: Silence de l’ARSAT et des autorités, Kebbir.M Abdoulaye s’interroge

Depuis quelques jours, certains consommateurs mettent du temps pour s’approvisionner en carburant et un sentiment d’inquiétude de pénurie est perceptible et gagne l’esprit des consommateurs.
En réalité, il n’existe pas un arrêt de production de pétrole au niveau de la raffinerie de Djarmaya, ni un changement au niveau des prix de carburant, ni un dysfonctionnement dans le circuit de distribution, d’approvisionnement par les marketeurs et enfin aucun mouvement de grève observé, ou un conflit entre les autorités et les chinois comme en 2012.

La raffinerie de Djarmaya, unique raffinerie du Tchad, a été mise en exploitation en 2011. Elle est détenue à 60% par la China National Petroleum Corporation (CNPC) et à 40% par l’Etat tchadien à travers la SHT ( Société des Hydrocarbures du Tchad ).

La raffinerie de Djarmaya produit de l’essence, du gazole, du fioul lourd, du gaz naturel liquéfié et du polypropylène. Elle a une capacité de raffinage de 20 000 barils par jour. La raffinerie produit l’équivalent de 24 citernes de l’essence par jour soit l’équivalent de 860.000 litres par jour, 6 citernes de gaz par jour contre une demande de 9 citernes par jour ( 3 autres citernes sont importés).

Aujourd’hui il existe au niveau national 36 marketteurs agrées qui achètent des produits pétroliers auprès de la raffinerie.

Comme toute gigantesque machine industrielle avec des hautes technologies, la raffinerie n’échappe pas à cette exigence technologique. Ainsi chaque 3 ans, la raffinerie de pétrole de Djarmaya subie un arrêt de sa production pour une révision des machines pendant 45 jours.

Cette période de révision est susceptible de provoquer le dysfonctionnement du marché par de tensions inflationnistes jusqu’à pénurie. C’est le cas en 2019, lors de la révision des machines pendant 45 jours ! A l’époque, le gouvernement était obligé d’autoriser l’importation pour calmer le marché.

Cette année, la période de la révision des machines s’approche, normalement en mars 2023, mais reportée en Avril prochain par la demande du gouvernement afin de prendre des dispositions nécessaires. Cette année, la situation de crise de carburant observée en 2019 peut se répéter pour plusieurs raisons :
1- la raffinerie de Djarmaya a une capacité de stockage limitée jusqu’à un mois. Or la période de révision des machines s’étend jusqu’à 45 jours.

2- Aucune autre société nationale ou privée dispose une capacité de stockage égale ou supérieure à celle de la reffinerie pour répondre en cas de rupture ou insuffisance de stockage à moyen terme.

3- la Société Tchadienne de Dépôt Pétrolier ( STDT) créée il ya 3 ans dont la S.H.T ( Société des Hydrocarbures du Tchad) actionnaire principal, pour répondre à une stratégie nationale de sécurité et de réserve stratégique n’est pas
opérationnelle malgré la construction et mise en place des dépôts d’une capacité d’un ( 1) million de litres de carburant. Les dépôts existent mais sans produits pétroliers !

4- La raffinerie de Djarmaya étant créée pour répondre exclusivement au marché intérieur des produits pétroliers ( essence, gazoil, gaz…..) avec des prix subventionnés, l’importation est découragée car elle coûte chère par rapport aux prix de l’intérieur, sauf en cas de pénurie, crise que l’Etat encourage l’importation des produits pétroliers. Cependant l’Etat continue à encourager l’importation du gaz pour répondre aux besoins du marché intérieur qui nécessite 9 citernes de gaz par jour contre une production locale de la raffinerie de Djarmaya de 6 citernes par jour.

Un secteur en très forte hausse de la demande par rapport aux autres produits pétroliers ;

3- la demande nationale des produits pétroliers est en hausse régulière surtout le gaz face à l’augmentation de la consommation des ménages ( Etat, entreprises, consommateurs….) et l’exportation parfois clandestine vers certains pays limitrophes ;

4- certains marketteurs manipulent et agissent sur le marché par la spéculation pour alimenter la pénurie afin d’engranger des gros profits. Ils guettent les mouvements du marché ou agissent sur l’esprit des consommateurs par de fausses informations ;

5- la hausse de la demande cyclique de carburant lors de grands travaux publics, la période de la chaleur par la consommation élevée de l’essence, du gazoil ;

6- l’absence des dépôts des pétroliers dans d’autres provinces, l’état dégradé des routes, la longue distance entre la capitale, unique centre principal des dépôts pétroliers de grande capacité et certaines provinces, départements ..provoquent les tensions inflationnistes des produits pétroliers, malgré la régulation du marché par ARSAT ( Autorité de Régulation du Secteur Pétrolier Aval du Tchad ).
Suivant tous ces facteurs déclencheurs des tensions inflationnistes sur le marché des produits pétroliers, les marges de manœuvre sont très limitées pour ne pas dire inexistantes face à l’insuffisance, absence de mise en place opérationnelle de stratégie et actions de sécurité, réserve nationale des produits pétroliers. Des événements malheureux par exemple un incendie d’origine criminelle ou technique, une panne grave et inattendue au niveau de la raffinerie, tout le pays pourra basculer dans une crise énergétique sans précédent avec des graves conséquences sur l’activité économique.

Conclusions : le secteur pétrolier est vital pour la nation car il fait fonctionner toute l’activité économique, un domaine d’activités très sensible même au mouvement d’humeur, désinformation et les tensions inflationnistes sont récurrents malgré la régulation.

A cet effet une politique nationale de sécurité et de réserve stratégique des produits pétroliers est indispensable avec des dépôts stratégiques dans certains provinces, départements.

Améliorer le circuit d’approvisionnement et encourager la concurrence. Sa mise en œuvre et opérationnalisation est nécessaire pour prévenir et réagir en cas de crise.

Sans cela, la pénurie non seulement structurelle mais même cyclique ( conjoncturelle) est inévitable !
A court terme donc en avril prochain, date de l’arrêt des machines de la raffinerie de Djarmaya pour une révision technique, peut -on éviter une tension inflationniste sur le marché des produits pétroliers surtout de l’essence, gasoil et le gaz ? la réponse est hélas très difficile mais on peut contenir une pénurie à grande échelle en autorisant l’importation et maîtrisant la spéculation des opérateurs économiques.

Un autre problème qui existe est le silence des autorités de régulation et des départements Ministériels concernés pour une crise qui se profile à l’horizon ! Ou bien il faut réagir quand la crise produit ses effets dévastateurs sur les ménages et l’activité économique ?

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